mercredi 14 décembre 2016

Casque Audio "Raisonance"- L'opposition entre le corps organique (organon) et le corps orgiaque (Ergon)



La demande concerne bien ici un casque audio mais l’innovation réside dans l’exploration d’une modalité de transmission qui n’est pas purement auditive, ou qui, du moins ne consiste pas dans le pur et simple enregistrement d’un contenu sonore. Comment faire en sorte que la sensibilité à la séquence sonore ne se limite pas à la réception de données via le canal auditif ? Le simple fait de concevoir la boîte crânienne comme une caisse de résonance impose une certaine considération du corps. Le principe même de la conduction osseuse induit qu’on n’écoute pas la musique sans en faire partie intégrante, sans convertir ces ondes sonores qui nous atteignent en ondes tactiles que cette fois ci nous émettons. Nous libérons un son, celui-là même que nous faisons vibrer par l’os occipital. Je vibre sous l’effet du son et cette onde vibratoire devient émettrice. En d’autres termes, je n’écoute pas la musique sans devenir dans l’instant même de mon écoute le déclencheur de son onde propagatrice, le convertisseur d’ondes sonores en ondes vibratiles ou sismiques.

Nous ne sommes plus dans une relation d’objet : le son à sujet, l’auditeur. Ce n’est même plus le compositeur qui me transmettrait à moi l’auditeur une information, une séquence codée de sons. C’est beaucoup plus confus que cela et moins assignable. On ne sait plus exactement qui fait quoi et d’où par quoi ? De fait nous sommes toujours déjà dans le son et le silence lui-même n’est qu’une certaine fréquence sonore. Il est plein de son. Le bruit, c’est toujours du silence amplifié. Par conséquent, plutôt que de parler de silence, nous devrions évoquer un fond sonore. De nombreux films de David Lynch, notamment Lost Highway, utilisent une certaine fréquence particulièrement grave pour nous plonger presque inconsciemment dans une atmosphère tendue au cordeau. Nous ne savons pas pourquoi nous sommes si complètement immergés dans une action, dans un climat, mais si l’image visuelle est devant moi, sur l’écran, l’image sonore s’est glissée en moi et c’est en moi qu’elle déploie la gamme d’intensités suffisamment graves, sourdes, comme émises par un caisson de basse, pour impliquer mon corps dans un jeu de vibrations dont il est moins le récepteur, l’observateur distant et « objectif » que la sonde sismique, la boîte de résonance, cela même qui n’enregistre des séquences sonores qu’en leur prêtant par la même l’amplitude de son aptitude à leur faire écho. 
Je ne suis plus un auditeur séparé, qui réceptionne un son du monde, distant du bruit qu’il entend, je suis une sonde qui ne capte rien sans immédiatement l’émettre, sans faire de ce qu’elle reçoit une transcription impulsive de la séquence sonore émise par ce que j’ai entendu. La musique s’insinue en moi comme autant de stimulations qui par l’entremise de mes nerfs capteurs joue sur la gamme de ma complexion nerveuse, laquelle va transcrire, une fois transmise à mon cerveau les informations transmises en impulsions émises, de telle sorte qu’il n’est pas plus souhaitable que possible de distinguer ce que je reçois et ce que j’interprète.
Pour le dire autrement, il n’est plus question d’écouter mais de restituer. On ne reçoit rien, on est l’élément conducteur d’une force qui nous traverse de part en part. On n’assiste pas à un concert, on est criblés de séquences de détonations subtiles qui ne s’adressent pas à un sens en particulier.
Nulle part cette image du crible que nous sommes et au travers duquel quelque chose du monde s’émet de lui-même à lui-même n’est plus parlante que dans Matrix et l’aiguille qui s’insinue directement dans le cerveau via le trou à la base de l’os occipital. Il faut bien noter ici la distinction entre l’humanité trompée, enfermée dans la matrice par la multitude câbles qui suivent tous les centre nerveux de la moelle épinière jusqu’au cerveau (séquence de l’Eveil de Mr Anderson dans son caisson) et le recours volontaire des rebelles à cette unique aiguille transperçant la masse cérébrale jusqu’à son point le plus « névralgique ».

Dans l’enfer du musicien de Jérôme Bosch, une autre modélisation de cette conduction sensible de la musique nous est proposée par l’image de cet homme transpercé par les cordes d’une harpe, comme si ces nerfs ne faisaient plus qu’un avec les fils de l’instrument. La référence explicite à la torture nous oriente une fois encore vers le rejet de toute écoute attentiste, passive. Il n’est pas question d’enregistrer mais d’être affecté, transpercé, criblé, modulé par le son même, lequel ne saurait simplement se transmettre à nous par l’oreille. 
C’est sur ce point que le principe même de la conduction osseuse est intéressant et pas seulement d’un point de vue métaphorique : « jusqu’à la moelle de ses os ». Cet appareillage nous met sur la piste (très riche pour le design) de ce que Gilles Deleuze, reprenant l’expression d’Antonin Artaud appelle le corps sans organes : « Est-ce si triste et dangereux de ne plus supporter les yeux pour voir, les poumons pour respirer, la bouche pour avaler, la langue pour parler, le cerveau pour penser, la tête et les jambes ? Pourquoi ne pas marcher sur la tête, voir avec la peau, respirer avec le ventre, Chose simple, Entité, Corps plein, Voyage immobile, Anorexie ? Vision cutanée, Love, Expérimentation (…) Là où la psychanalyse dit : Arrêtez, retrouvez votre moi, il faudrait dire : Allons encore plus loin, nous n’avons pas encore trouvé notre Corps sans Organes, pas assez défait notre moi. Remplacez l’anamnèse par l’oubli, l’interprétation par l’expérimentation. Trouvez votre Corps sans Organes, sachez le faire, c’est question de vie ou de mort, de jeunesse ou de vieillesse, de tristesse et de gaieté. Et c’est là que tout se joue … C’est là que tout se joue pourtant : enjeu éthique, enjeu de liberté, assurément. Quand bien même le Corps sans organes ne serait qu’une hypothèse, elle vaut bien l’hypothèse des corps biologiques, psychiatriques… » (Gilles Deleuze et Félix Guattari, Mille Plateaux)
Un casque auditif qui ne se connecte qu’aux oreilles de l’utilisateur repose sur la conception d’un corps organique, c’est-à-dire organisé. Que celui qui a des oreilles entende, que celui qui a des yeux voit, etc. Si cette conception était vraiment pertinente, aucun aveugle ne pourrait se faire une représentation mentale d’un espace clos. Or, lorsqu’il marche dans un hangar un non-voyant peut parfaitement visualiser les distances entre les murs par l’effet de résonance de ses pas. Il crée ce que l’on peut dés lors appeler littéralement une image sonore. Il voit avec ses oreilles. Il faut donc en finir avec cette conception fausse de la perception. Nous ne sommes pas un ensemble de fonctions dont chacune serait centralisée par un seul organe. Ce n’est pas seulement qu’il existe des phénomènes de compensation entre différents éléments du corps c’est que le corps ne se réduit pas à cela : « Il n’y a rien de plus inutile qu’un organe » dit Antonin Artaud. Si nous n’étions qu’un assemblage d’organes, nous ne ferions que survivre, mettre en œuvre des fonctions vitales mais la vérité est que nous existons, c’est-à-dire que nous brouillons continuellement les codes fonctionnalistes d’une médecine de spécialistes du foie, du cœur, des os, etc. (c’est là l’une des limites dramatiques de la médecine occidentale (ainsi que l'une des causes du déficit chronique de la sécurité sociale)). 

Il convient de remonter à l’étymologie grecque pour saisir pleinement les implications de ces deux conceptions opposées du corps. Organe vient du grec « organon » qui signifie instrument. On parle ainsi de corps organique, quand on définit le corps mécaniquement comme une voiture dont le fonctionnement repose sur l’ordonnancement des pièces. On pourrait dire de la greffe, ou de la chirurgie qu’elles reposent sur cette conception mécaniste du corps humain.
Le problème vient de ce que ce corps organique rend parfaitement compte de la vie, voire de la survie. Il explique comment le corps fonctionne mais se révèle incapable de rendre compte de ce simple fait qu’il « existe », c’est-à-dire qu’il s’affirme, qu’il manifeste une présence, une signature, une stylisation de l’existence. On peut expliquer l’écoute en détectant en nous un appareil à enregistrer du son mais alors on passera complètement à côté du fait que nous n’entendons aucun bruit sans l’émettre. Pour parvenir à cette compréhension là, peut-être convient-il de miser sur l’efficience en nous d’un autre corps moins organisé, moins discipliné, plus « flottant », plus « créateur ». Un corps artiste, un corps plus dionysiaque qu’Apollinien, un corps « Orgiaque ». Ce terme n’est pas seulement érotiquement connoté (même si évidemment il a donné les mots : « orgasme » et « orgie ») car « Orgia » en grec vient de Ergon qui signifie « action, œuvre, travail, énergie ».

On pourrait concevoir que le corps orgiaque s’oppose au corps organique de la même façon que la médecine orientale s’oppose à la médecine occidentale, c’est-à-dire que le corps humain est vu ici comme un pur conducteur de flux et là comme un assemblage de pièces. Autant le corps organique est divisible en autant de fonctions que d’organes autant le corps orgiaque est aussi indivisible qu’une multitude de carrefours labyrinthiques au sein desquels ne cessent de se libérer  et d’émettre des courants de conductions. Ce n’est plus un corps d’organes, c’est un corps d’intensités et de modulations. Est-ce vraiment un corps d’ailleurs ? Est-il possible de le délimiter dans l’espace ? Rien n’est moins certain. Dans le corps orgiaque, la question médicale n’est pas de savoir ce qui flanche, encore moins d’établir un diagnostic (connaître en divisant) du mal dont on souffre mais d’être simplement attentif à ce qui fait qu’un patient, et non un cœur, une rate ou un système nerveux, émet telles intensités (basses) de vie.
Le médecin occidental confronté à deux patients souffrant du même cancer, développant les mêmes métastases ne pourra pas expliquer que celui-ci meurt et que l’autre ne meurt pas au même moment et si nous le sommons de répondre, il évoquera "ce  sur quoi la médecine ne peut opérer", c’est-à-dire le moral du patient, la puissance de son investissement dans le fait d’exister (ce que Spinoza appelle le conatus). Mais cela ne revient-il pas à dire que le médecin occidental soigne non pas des patients mais des organes ? Le médecin oriental en percevant le corps comme la libération de flux d’énergie, littéralement comme « un chœur à l’intérieur duquel s’interpénètrent une multitude voix » ne s’intéresse qu’au corps orgiaque, émetteur de séquences, de sons, de signes. Un corps c’est d’abord un émetteur de signes, un conducteur de séquences d’affects, c’est le chiffre de l’énergie que vous libérez en la brûlant. Exister c’est un feu et ce n’est pas « vivre » (vivre c’est fonctionner). L’analyse que font Deleuze et Guattari de l’anorexique est particulièrement éclairante. L’anorexie n’est pas un dysfonctionnement du corps organique, une dépression, un traumatisme de la part de l’adolescente par rapport à un drame survenu dans l’étroitesse du milieu familial, c’est l’affirmation d’un corps orgiaque cherchant à se débarrasser de la contrainte du corps organique, à flotter dans son corps, à l’exercer comme une puissance conductrice et émettrice de flux et de signes. Il semble donc difficile de concevoir le dispositif de conduction osseuse d’un casque audio sur le présupposé d’un corps organique, car la notion même de conduction induit cette force d’affirmation du corps orgiaque, corps présent et non passé, corps efficient et non projeté, corps senti et non simplement reflété :

« Lorsque vous lui aurez fait un corps sans organes alors vous l’aurez délivré de tous ses automatismes et rendu à sa véritable liberté. Alors vous lui réapprendrez à danser à l’envers comme dans le délire des bals musette et cet envers sera son véritable endroit. » 
    « Pour en finir avec le jugement de Dieu » - Antonin Artaud


dimanche 11 décembre 2016

"Peut-on avoir raison contre l'Etat?" - Texte de Maximilien Robespierre



"Si le ressort du gouvernement populaire dans la paix est la vertu, le ressort du gouvernement populaire en révolution est à la fois la vertu et la terreur: la vertu sans laquelle la terreur est funeste; la terreur, sans laquelle la vertu est impuissante. La terreur n'est autre chose que la justice prompte, sévère, inflexible; elle est donc une émanation de la vertu; elle est moins un principe particulier, qu'une conséquence du principal général de la démocratie, appliqué aux plus pressants besoins de la patrie.
On a dit que la terreur était le ressort du gouvernement despotique. Le votre ressemble-t-il donc au despotisme ? Oui, comme le glaive qui brille dans les mains du héros de la liberté ressemble à celui dont les satellites de la tyrannie sont armés. Que le despote gouverne par la terreur ses sujets abrutis, il a raison comme despote : domptez par la terreur les ennemis de la liberté, et vous aurez raison comme fondateurs de la république. Le gouvernement de la révolution est le despotisme de la liberté contre la tyrannie. La force n’est-elle faite que pour protéger le crime, et n’est-ce pas pour frapper les têtes orgueilleuses que la foudre est destinée ?
      Maximilien Robespierre - Discours et rapports à la Convention

Pour aborder ce texte, il convient d’avoir bien présent à l’esprit qu’il a été écrit pour être lu, « porté » dans le contexte politique de la Révolution Française. Au-delà de tout ce qui a été dit de cette période, c’est l’intensité, la puissance de persuasion et les conséquences directes d’un discours à la tribune qu’il importe de mesurer afin de saisir l’impact oratoire des formules utilisées. Robespierre ne se contente pas ici de défendre une affirmation, il essaie de se faire approuver, voire acclamer en l’énonçant. Il ne suffit pas qu’une proposition soit exacte, ou du moins argumentée pour être ici admise, encore faut-il qu’elle soit belle, édifiante et séduisante aux oreilles de la foule. La violence contenue dans ce discours nous dit bien quelque chose de cette distorsion au fil de laquelle les idées de la Révolution française dont l’esprit imprègne encore aujourd’hui notre constitution et les principes fondateurs de nos lois, devînt, pendant un temps limité, l’instrument d’une terreur sans pitié.

Robespierre justifie d’emblée le recours à la terreur par le contexte révolutionnaire, lequel est assimilé à la guerre. Il ne suffit pas d’être juste dans une période d’instabilité politique, encore faut-il que l’on soit terrible, c’est-à-dire que l’on applique sans faillir les principes mêmes de la révolution. Dans la bouche du tribun, Terreur signifie finalement Exactitude, Application, Rigueur morale. A quoi servirait-il d’être vertueux si on ne l’est que faiblement ? Cette nuance est absolument cruciale. Il y a bien dans l’esprit de Robespierre le despotisme d’un côté et la République de l’autre mais comment la seconde pourrait-elle écraser la première en mettant en application dans sa lutte les valeurs qu’elle entend promouvoir comme l’égalité, la liberté, le droit ? Si le Droit ne s’impose pas violemment, il ne s’imposera pas du tout. Les idéaux de la Révolution reviennent tous comme à leur source originelle à la Raison : si la Monarchie ne peut perdurer, c’est parce qu’elle repose sur une domination « de fait » arbitrairement fondée sur un droit Divin, c’est-à-dire irrationnel, religieux, imposé au peuple comme la légitimation d’une inégalité de traitement creusée dans le roc du Droit du sang. Un roturier ne peut prétendre aux mêmes droits qu’un noble, c’est comme ça.

Robespierre soutient finalement que le renversement de cette situation injuste ne peut se concevoir que dans l’inflexible application de principes justes qui doivent abattre l’ordre ancien au profit de l’ordre nouveau, et cette application ne peut traiter d’égal à égal avec les anciens bénéficiaires de la monarchie. En d’autres termes, la terreur, c’est-à-dire concrètement la mise à mort de personnes désignées par simple décret, est une méthode, pas un aboutissement. Il faut à la vertu ce mode d’écriture là. Soyons justes, imposons la justice en faisant preuve de sévérité et de persécution arbitraire à l’égard des injustes. Il n’y a dans l’esprit de Robespierre pas de contradiction. C’est même le contraire et son discours s’appuie sur un chiasme qu’il a emprunté au Philosophe Pascal : « La justice sans la force est impuissante ; la force sans la justice est tyrannique. » Appliquée à la terminologie de Robespierre, cela donne : « la vertu, sans laquelle la terreur est funeste ; la terreur, sans laquelle la vertu est impuissante. » Il y a une terreur funeste, c’est celle qui est vicieuse et monarchiste, et une terreur juste qui est révolutionnaire. Ce qui compte n’est donc pas la terreur mais l’esprit dans lequel elle est « pratiquée ». La Révolution aussi met à mort mais pas au nom des mêmes valeurs que les exécutions ordonnées au nom du Roi. 

L’esprit même de ce chiasme entre justice et force, entre vertu et puissance, est la clé de voûte de l’argumentation de Robespierre (on pourrait dire également de Pascal mais la pensée du philosophe est de moindre impact historique que celle de l’orateur). Il est immoral et pervers d’exercer sa force sans justice mais parfaitement inefficace de vouloir la justice sans l’imposer par la force. Le problème n’est pas tant qu’il y ait, d’un côté, la réalité des faits (dans laquelle s’exerce la force) et de l’autre les exigences du Droit, de la conscience (où prévaut la justice), le problème vient de ce que l’action accomplie, pleine, aboutie, ne peut se concevoir que dans la complémentarité des deux tableaux. Il ne s’agit pas d’une lutte dans laquelle nous aurions à choisir entre deux territoires, mais plutôt d’une difficile compatibilité, requise par la nature même de notre être : « Corps et âme », un 2 en 1. Et cette complémentarité est si ardue que nous sommes finalement confrontés à ce choix entre deux mauvaises solutions : devenir  une belle âme enfermée dans ses principes vertueux ou au contraire, ou vouloir des résultats quels que soient les moyens utilisés pour y parvenir : un parfait salaud.

C’est sur ce point que la différence entre Pascal et Robespierre est particulièrement nette car autant le philosophe estimait que la sortie de ce problème était impossible, autant l’orateur de la Révolution nous propose « malheureusement » une solution qui n’est  autre que  « la terreur juste ». Pour que la vertu triomphe aussi dans les faits, dans les pays, il faut abattre despotiquement le despotisme, détruire arbitrairement l’arbitraire, terrifier la terreur. Nous ne sommes plus ici devant les principes d’une nouvelle conception de l’Etat qui tenterait de convaincre par des arguments mais bel et bien broyés par les rouages d’une Machine qui ne justifie d’aucun autre fondement que celui de son autolégitimation. Il faut que la République s’autoproclame parce qu’elle ne saurait reconnaître en elle le principe de contestation de sa fondation sans immédiatement faillir à l’exigence pure, absolue de sa tâche qui réside dans la Justice. Il s’agit d’abattre l’absolutisme de la Monarchie en établissant un régime parlementaire, mais on ne saurait l’installer par la paix et la concertation dans une période pleine de troubles et de turbulences. La seule solution est d’abattre absolument l’absolutisme et d’imposer par une terreur aveugle et « pure » la démocratie parlementaire. 

Mais alors, peut-on avoir raison contre la machine étatique Révolutionnaire ? Non, on ne peut avoir raison qu’à partir de son instauration mais pas avant, parce qu’il n’est pas envisageable d’avoir raison dans un régime où la Raison n’est pas efficiente, n’est pas reconnue en tant que valeur fondatrice des institutions, et c’est cela que la République révolutionnaire a pour vocation d’installer. L’état est une machine de guerre institutionnelle qui justifie l’instauration provisoire d’un régime de terreur. La différence, selon Robespierre, entre le despotisme et la république vient de ce que, pour le premier, la terreur est un principe de base, alors que, pour le second, elle est « une conséquence du principe général de la Démocratie, appliquée aux besoins les plus pressants de la Patrie ». La terreur est une mesure d’urgence, parfaitement légitimée par les principes fondamentaux de la république, en tant que moyen, et assurément pas à titre de principes ou de finalité. C’est justement en ce sens que l’utilisation du terme de machine de guerre pour qualifier l’Etat se justifie. La machine doit se comprendre comme un dispositif qui n’est ni organisme ni mécanisme. Elle se distingue évidemment du premier puisqu’elle n’est pas naturelle, innée et du second parce qu’elle désigne un montage plus approximatif, un appareillage mettant en liaison des éléments hétéroclites alors que le mécanisme désigne un système « clos », planifié à l’avance. Il y a une part d’improvisation dans la machine qui fait ce qu’elle peut avec ce que son bricoleur a à portée de mains. Peut-être pouvons-nous ranger la terreur parmi ses éléments là : justifiée par l’urgence de la « réparation », de la tâche à mener à bien « maintenant ». En même temps, ce caractère momentané, presque hasardeux du recours à la violence aveugle pose question car nous ne connaissons pas dans l’histoire d’exemple de révolution pacifique, sans bain de sang ni mise à mort rapide des opposants ni déportation dans des camps de « rééducation ». 


Si la terreur n’était motivée que par l’urgence de la situation, comment ne pas voir que cette urgence revenant toujours, elle fait bel et bien partie intégrante du processus révolutionnaire ? Ce qu’il s’agit de bien comprendre ici, c’est tout simplement que la révolution est structurellement le contraire de l’Etat, comme son nom l’indique : Etat :« stare, se tenir debout », la révolution consistant elle à déstabiliser, à renverser, à faire tomber. Que penser dés lors d’une révolution visant à installer l’Etat, si ce n’est qu’il faut bien qu’elle se contredise, en tant que révolution, voire qu’elle reprenne exactement, dans leur forme, les appareils, les réseaux et les cadres de l’autorité qu’elle renverse afin de les remettre à l’œuvre mais sous le vernis d’une autre idéologie, d’une autre terminologie, d’une autre autorité. De la Monarchie de Louis XVI au Comité de Salut Public de Robespierre, on passe d’une forme de répression arbitraire à une autre,  de l’enfermement à la Bastille à celui de la conciergerie. Si les modalités changent, c’est la même nécessité de supprimer la contestation qui s’impose, parce que l’on a toujours l’impression que vient le moment d’arrêter de discuter, fût-ce pour instaurer un régime de libre parole autorisant la discussion. Le problème, ce n’est pas tant l’Etat que le pouvoir (peut-on concevoir un Etat sans pouvoir ? ).
« On a dit que la terreur était le ressort du gouvernement despotique. Le votre ressemble-t-il donc au despotisme ? Oui, comme le glaive qui brille dans les mains du héros de la liberté ressemble à celui dont les satellites de la tyrannie sont armés. Que le despote gouverne par la terreur ses sujets abrutis, il a raison comme despote : domptez par la terreur les ennemis de la liberté, et vous aurez raison comme fondateurs de la république »
On pourrait ici avoir l’impression que l’utilisation d’un registre et d’images plus poétiques que strictement argumentatifs fait perdre toute rigueur au propos mais ce serait passer à côté d’une procédure essentielle et déterminante pour notre sujet : la mise sous tutelle politique de la notion de Raison. « Avoir raison » dépend du régime que l’on installe. Il y a « avoir raison » pour un despote et « avoir raison » pour la République. Ce n’est donc pas la peine que les deux conceptions opposent des arguments pour savoir laquelle de ces deux façons différentes d’avoir raison « a vraiment raison ». Il suffit que l’une triomphe de l’autre,  par la force, pour seulement ensuite installer le critère de la Raison à l’aune de laquelle elle s’autoproclamera la meilleure et la seule. Evidemment, quand on lit la Prose de Robespierre, on se doute bien qu’entre « sujets abrutis » et « dompteur des ennemis de la liberté », le choix s’impose, mais c’est exactement de cette façon que le Révolutionnaire justifie son discours. Il faut que le droit s’impose à la force par la force, parce qu’aucun droit ne s’impose « de plein droit ». Il faut qu’une fois instauré, nous acceptions un régime de droit « dans les faits », et que nous arrêtions de considérer notre contestation comme un droit car nous ne réalisons pas alors que nous sommes en train de nous contredire en portant atteinte à cela même qui rend possible, effective, la notion de contestation légitime, à savoir un état Républicain. Que nous puissions contester légitimement la notion de domination par droit divin, c’est ce que l’instauration de la République a rendu non seulement possible mais aussi effectif, réel, « à l’œuvre », dans une constitution de Droit. Se révolter n’est dés lors plus légitime, puisque c’est précisément au sein d’un régime de droit devenu factuel que nous ferions entendre cette révolte, laquelle ne pourrait se concevoir que comme la contestation du droit par le droit lui-même.
« Il n’en demeure pas moins, dit Kant,  qu’il n’est absolument pas permis au sujet de résister en opposant la violence à la violence. En voici la raison : c’est que dans une constitution civile déjà existante le peuple n’a plus le droit de continuer à statuer sur la façon dont cette constitution doit être gouvernée. Car, supposé qu’il en ait le droit, et justement le droit de s’opposer à la décision du chef réel de l’Etat, qui doit décider de quel côté est le droit ? Ce ne peut être aucun des deux, car il serait juge dans sa propre cause. Il faudrait donc qu’il y eût un chef au-dessus du chef pour trancher entre ce dernier et le peuple, ce qui se contredit. »

Que le Droit est une notion relative, c’est ce que le Révolutionnaire a prouvé, d’une part, en trouvant en lui la source de la légitimité de son action en renversant  la monarchie (ce qui signifie bien que le droit divin n’était pas la seule légitimité possible) et d’autre part en instaurant un régime conforme à sa conception universelle, égalitaire du Droit, mais, une fois la République « posée », appliquée, solidifiée dans l’édification d’un Etat et les principes d’une Constitution, le Droit cesse d’être relatif. Il est absolu. Si l’on se donne arbitrairement le droit de contester un Etat de droit, alors deux conceptions de ce que doit être le droit vont s’affronter, chacune se défendant par elle-même d’être légitime dans sa contestation de l’autre, de telle sorte que deux processus d’autolégitimation ne feront que s’affronter, se ruiner, se fragiliser mutuellement et surtout inutilement. Il n’existe pas ici de transcendance possible. Les hommes sont seuls et puisque le chef de l’Etat a été choisi au terme d’un processus légal, toute tentative visant à le destituer sera nécessairement illégale.

Il ne fait aucun doute que si Kant approuve les Idéaux et la constitution instaurée à partir de la Révolution française, il ne légitime d’aucune façon la terreur et se désolidarise totalement de la thèse défendue ici par Robespierre, mais en même temps, il est pareillement indiscutable que nous retrouvons dans la réfutation fondamentale par Kant de ce droit à l’insurrection contre un Etat de Droit, le principe même de l’inconditionnalité de la République (si on se lance dans un processus de légitimation du légitime, on entre dans un cercle vicieux au sein duquel la notion même de Droit perdra tout sens). C’est à cette inconditionnalité que Robespierre donne ici le visage hideux de la Terreur.

jeudi 1 décembre 2016

Méthode de l'explication de texte - 3e sujet du baccalauréat (Terminales ES1 et S4)


1)    Lecture et  choix du sujet
Pourquoi choisir de traiter un texte plutôt qu’une question ? Pourquoi préférer un travail d’explication à l’exercice de la dissertation ? Le premier critère est celui d’une certaine compréhension du texte. Il ne s’agit pas d’avoir, en seulement trois lectures, parfaitement saisi la pensée de l’auteur dans ses moindres détails. C’est impossible (ça l’est aussi pour un spécialiste de l’auteur en question). Par « certaine » compréhension, il faut seulement entendre que nous avons compris en quoi il est « un » texte, c’est-à-dire que nous avons perçu que l’auteur ne dit finalement ici qu’une seule chose. Il défend « une » seule thèse. Si nous avons le sentiment que l’auteur se contredit, cela signifie que nous avons mal lu. Il est absolument impossible de choisir le texte si on ne parvient pas à dépasser cette impression. Au bout de cinq lectures sans résultat (c’est-à-dire que l’on ne perçoit pas que le texte défend une seule idée), il vaut mieux renoncer et choisir un autre sujet.
Le second critère réside dans notre capacité à nous familiariser avec le passage à expliquer. C’est une chose de percevoir l’unité d’un texte, autre chose de s’estimer capable de « polariser » son esprit d’analyse et de réflexion sur lui pendant quatre heures. Il ne s’agit pas d’écrire ce que nous pensons du texte mais de penser « en » lui. Est-ce que le texte nous « va » de la même façon qu’un vêtement que l’on essaie épouse confortablement notre corps et que l’on se sent bien dedans ?

Il est une dernière disposition d’esprit dans laquelle il convient d’emblée de se situer : « faire place nette au texte ». Quand nous rédigeons une dissertation, nous décidons des arguments, des références, des enchaînements d’idées, etc. Ici, nous essayons d’abord de faire le vide, d’accueillir la pensée de l’auteur, de détruire le plus que nous pouvons les couches de préjugés qui la plupart du temps font que nous n’écoutons pas « vraiment » les arguments d’une personne avec qui nous discutons. Nous l’interprétons, nous la cataloguons en fonction de nos valeurs, de nos a priori. Tout texte philosophique décrit la cohérence d’une affirmation. Nous ne sommes pas obligés de nous accorder avec elle, mais nous ne pouvons pas en ignorer la pertinence, la rigueur, la justesse argumentative. Plus nous nous dépouillerons de nos préjugés en lisant le texte, mieux nous l’expliquerons.

2)    La distinction du thème et de la thèse (rédiger l’introduction)
 a) l’idée essentielle
Si nous avons choisi le texte, nous avons perçu, même confusément, son unité. L'auteur veut nous dire quelque chose et il a les moyens de le justifier. Il convient maintenant de préciser la thèse qui donne à ces lignes une unité de convergence. Il avance plusieurs idées qui s’enchaînent mais il en est une dont nous percevons bien qu’elle constitue le but, la finalité des autres. Il veut en venir quelque part et ce « quelque part » est nécessairement présent dans le texte. Une fois lu dans sa totalité, nous réalisons que toutes ces phrases aboutissent à une affirmation qui se détache des autres par son amplitude et sûrement aussi par son originalité, « sa puissance ». La compréhension de ce qui rend une phrase philosophiquement  plus puissante qu’une autre ne s’acquiert pas « du premier coup ». C’est souvent une question de résonance, comme ces propositions que l’on ne comprend pas tout de suite mais dont on perçoit déjà qu’elle « vont loin », qu’elles sont le fruit d’un travail de réflexion préalable. Il importe de saisir dans le texte la thèse dont la puissance et la résonance se détachent des autres tout en en étant l’aboutissement, l’horizon. Cette idée essentielle doit être exprimée en une phrase suffisamment synthétique et précise pour être sans aucun doute le point auquel Simone Weil veut « en venir ». Il a construit une machine argumentative pour fonder cette affirmation.
Cette formulation, c’est ce que nous situerons à la fin de notre introduction. Auparavant, nous amènerons la thèse par la description du thème qui est très différent.


     b) Le thème
Notre introduction ne peut absolument pas commencer par : « ce texte nous interroge sur… » ou « il est question dans ce texte ». Il faut amener le texte et non partir du principe qu’il est donné. L'auteur prend position sur une question que de nombreux autres philosophes ont également traitée. Il s’agit donc d’évoquer ce problème, en évitant les formulations trop « passe-partout » du style « les hommes se sont toujours interrogés sur » ou « De tout temps, l’humanité, etc. » Le thème est nécessairement un sujet très vaste qu’il n’est pas bien difficile de poser. Une fois rédigées ces premières lignes dans lesquelles nous l’évoquons, nous pouvons formuler l’idée essentielle du texte en marquant bien le passage du thème à la thèse essentielle par le biais de la formule : « Ici Simone Weil soutient que… » ou « on trouve ici sous la plume de Nietzsche », ou autre (mais toujours avec l’expression claire d’une focalisation : avant on évoquait un sujet général, maintenant on en vient à ce texte là »). Il faut bien dissocier ici l’ordre de découverte d’un texte (Thèse – Thème) et celui de notre introduction rédigée qui est exactement l’inverse (Thème – Thèse)

3)    La structure du texte
Après l’introduction, il importe de donner idée de la façon dont le texte « fonctionne », en tant que machine à argumentation. L'auteur veut nous convaincre de la pertinence de sa thèse et a utilisé pour le faire un ensemble de phrases qui ne sont pas reliées les unes aux autres n’importe comment. Il utilise des figures de style, des procédés rhétoriques, peut-être des images, etc. Il convient donc de décrire ce travail mis en place par l’auteur. Un texte est un discours qui nous saisit, qui nous capte  en un certain lieu et qui nous « dépose » en un autre lieu. C’est un mouvement. Il est très important de saisir cela. Car s’il y a un certain passage qui nous pose problème, il suffit de revenir à cette unité dynamique du texte : nous ne comprenons tel moment mais nous avons compris celui d’avant et d’après. Nous réaliserons ce qui nous échappe en nous interrogeant sur la pièce qui nécessairement manque au « puzzle ». S’il dit telle chose ici et telle autre là, ce qui relie l’une à l’autre ne peut être que celle-ci.
Si nous prêtons attention aux connecteurs logiques, nous voyons à quel point le texte est ponctué de « par conséquent, donc, or, car ». Cela nous fournit des indications très précises sur le mode de fonctionnement du texte, sur ses articulations. Nous pourrons nous appuyer sur ces indications pour rédiger ce paragraphe décrivant la structure du passage à expliquer.

4)    L’explication linéaire du texte
 Le terme d’ « explication linéaire » ne signifie pas qu’il soit nécessaire d’expliquer le texte ligne à ligne, bien au contraire. Plus on découpe le texte, plus on l’éclaire du mauvais côté, en le présentant comme ce qu’il n’est pas: un ensemble qu’il serait possible de diviser en parties. Il est plutôt un mouvement qui se déploie. Rien d‘autre à faire que de suivre ce mouvement en étant attaché à rendre toutes ses nuances, tous ses détails.
Il convient de prendre le terme d’ « explication » au pied de la lettre : comment nous y prendrions-nous pour rendre clair à une autre personne la totalité de ce passage ? L’auteur a utilisé ses mots pour nous convaincre du bien-fondé de sa thèse. Nous avons compris là où il voulait en venir, nous voyons clair dans son « jeu » et nous allons essayer de rendre ce mouvement plus familier à un éventuel lecteur. Rien ne saurait davantage convaincre notre correcteur de notre compréhension du texte que notre aptitude à le « recouvrir » d’autres mots, à connecter notre utilisation de la langue à la sienne sans la recopier et sans nous éloigner. Les défauts majeurs dont il faut nous éloigner sont, en effet :
- la paraphrase : elle consiste à se tenir au plus prés du texte sans manifester la plus petite capacité d’assimilation. On le suit tellement « pas à pas » qu’on effectue une très mauvaise traduction. Expliquer un texte suppose que l’on est capable de prendre un peu de hauteur. Un déclic se produit alors : on réalise que ce que l’auteur dit éventuellement avec la langue de son époque, avec un langage nécessairement philosophique, peut se dire autrement. C’est cela une explication : d’abord une entente entre deux mouvements : celui du texte et celui de l’enveloppement de son sens par votre esprit. Il s’agit alors de porter témoignage de cet enveloppement en prenant tout de même un risque relatif. Par risque, il s’agit de désigner le fait que nous pensons saisir suffisamment le mouvement de la démonstration de l’auteur (là où il veut en venir) pour nous éloigner un peu de son vocabulaire, de son chemin afin de le restituer. C’est exactement ce que l’on entend finalement par « enseigner ». Un professeur fait comprendre à ses élèves le sens du texte d’un auteur en utilisant sa propre puissance de conviction à lui, en la mettant au service d’un philosophe, quitte à faire usage de sa propre façon de parler, de ses exemples. S’il est sûr de comprendre ce qu’il explique, il sait bien qu’il retombera toujours sur ses pieds, c’est-à-dire sur ce que l’auteur a exactement voulu dire. Eviter la paraphrase, c’est prendre ce risque là, risque très relatif dans la mesure ou, en principe, si nous avons choisi ce sujet là, c’est bien que nous pensons avoir compris le sens du texte.

- L’éloignement du texte : s’il y a « risque », c’est bien par rapport à un danger et ce danger réside dans le fait de sortir complètement du texte, voire de faire un contre sens. Pour éviter ce piège, il importe d’être vraiment certain d’avoir cerné le mouvement du texte, c’est-à-dire d’avoir vu comment le philosophe « avance ses pions » ainsi que là où il veut en venir. On peut prendre certains détours d’explication du moment que l’on sait que l’on ira toujours dans cette direction qui est celle où l’auteur veut nous conduire. Il convient ici de marquer très clairement où nous nous situons dans nos développements : il est possible d’utiliser d’autres philosophes, et même d’opposer à l’auteur des arguments, d’autres écrivains. Tout est acceptable à partir du moment où notre correcteur pourra percevoir à quel point notre critique, notre explication ou notre volonté de prolonger le propos du texte reste cadrée dans un champ problématique imposé par le texte. C’est sur ce point que l’image du vêtement convient le mieux : nous avons choisi ce texte parce qu’il « nous va », comme une veste ou une chemise : nous pouvons y faire des mouvements suffisamment amples pour manifester la vigueur de notre corps dans une coupe dont on sait qu’on n’en déchirera jamais la toile. Toutes les actualisations (utiliser des exemples d’aujourd’hui pour expliquer un texte d’hier, c’est-à-dire des siècles passés) du texte sont autorisées si nous sommes sûrs de rester dans les limites de ce que l’auteur pose comme problème.
L’utilisation persistante du style indirect : « l’auteur dit que », « il soutient que… », etc. est déconseillée. Nous devons partir du principe que nous parlons toujours déjà à partir du texte, c’est-à-dire « en » lui. Quand nous exposons la pensée d’un autre auteur pour conforter ou objecter quelque chose à ce qui est défendu ici, il convient, par contre, de l’énoncer très clairement pour éviter les confusions. Choisir l’explication de texte (le 3e sujet), c’est s’engager à ne jamais s’écarter d’une ligne tracée par l’auteur. Réfléchissons bien à cela au moment de la réception des sujets.

5)    Conclusion
Pour conclure notre explication, nous devons premièrement insister sur l’idée essentielle. Après notre travail, peut-être nous apparaît-elle autrement, plus riche qu’au début de l’épreuve. On peut donc essayer de rendre compte de cet excédent de subtilité maintenant en entrant davantage dans les nuances de ce que l’auteur a voulu poser. Deuxièmement, il convient de montrer ce que l’auteur a apporté dans le traitement global du thème qu’il a abordé dans l’histoire de la pensée, éventuellement dans celle des sociétés. En quoi ce texte a-t-il apporté un éclairage nouveau sur la question qu’il a traitée ?